Comment ne pas obtenir d’augmentation de salaire ?

C’est un des moments les plus délicats de la vie professionnelle : aborder la question du salaire avec son manager est souvent une chose que l’on redoute, parce que c’est stressant, parce que l’issue est incertaine, parce que l’on va parler d’argent, de notre argent.

Pourtant, il est nécessaire de passer par là, car les augmentations ne tombent que très rarement du ciel ! Et si demander une augmentation de salaire se prépare, s’anticipe et même se répète — devant le miroir de la salle de bain ou avec un proche qui joue le rôle du N+1 —, les erreurs commises le jour J peuvent être fatales.

Voici les pièges dans lesquels ne pas tomber et quelques astuces pour arriver à vos fins.

Erreur 1 : mauvais timing

Selon vous, quelles sont les chances de succès d’une demande en mariage, genou à terre, un lundi matin sur un quai de métro bondé ? Il y a de fortes chances pour que l’intéressé ne soit pas des plus réceptifs vu le choix du lieu et du moment. C’est la même chose lorsque vous demandez une augmentation de salaire : si vous prenez votre responsable hiérarchique par surprise, au détour d’un couloir, ou que vous abordez le sujet sans introduction, vous risquez de crisper votre interlocuteur. À sujet sérieux, démarche réfléchie : solliciter un rendez-vous en ciblant une période adaptée et annoncer si possible la couleur.

Il en est de même pour le contexte dans lequel se trouve votre entreprise. Si l’année n’a pas été bonne en termes de résultats ou si tout le monde a la tête dans le guidon en fin d’année, évitez d’être la goutte d’eau qui fait déborder le vase en choisissant ce mauvais moment pour demander une augmentation.

Erreur 2 : ne négocier « que » son salaire

C’est une erreur assez commune : s’accrocher à un chiffre, un pourcentage que l’on pense pouvoir obtenir et oublier tout le reste. Kerd Jenkins, conférencier et expert en négociation, l’affirme : « La plupart des gens axent leurs négociations de salaire sur seulement un ou deux paramètres, il faut absolument élargir le champ des possibles pour créer un dialogue avec son boss, se laisser à chacun des espaces pour faire des compromis. »

Pensez par exemple à aborder des thèmes comme :

  • les jours de travail en remote ;
  • un aménagement spécifique de vos horaires de travail pour ne plus vous sentir coupable de sortir à 17 heures le mardi parce que c’est le jour de votre cours de dessin ;
  • un plan de bonus, une future promotion, une intégration dans une autre équipe, la gestion d’un projet qui vous tient à cœur…
  • la possibilité de recruter une personne de plus dans votre équipe

Les employeurs considèrent souvent une augmentation comme un jeu à somme nulle, voire une « perte » pour l’entreprise. Plutôt qu’une grosse augmentation de votre salaire, peut-être que le travail à domicile générera pour vous une énorme source de satisfaction, et le coût pour l’employeur sera presque nul dans ce cas.

Erreur 3 : utiliser la menace

Créer un rapport de force en pensant que la situation tournera en sa faveur est une autre erreur classique. Poser un ultimatum avant de quitter l’entreprise ou de commencer à chercher ailleurs n’est qu’en de très rares occasions productif. Outre le risque de faire passer votre requête comme une forme de chantage, vous offrez à l’employeur l’opportunité de s’acquitter d’éventuelles indemnités de licenciement.

Il en est de même pour ceux qui prétendent avoir une offre ailleurs. Jouer quitte ou double en prétendant avoir reçu une offre plus intéressante s’avère être un pari pour le moins risqué. En tentant ce coup de bluff, attendez-vous à des félicitations de votre supérieur et à une porte de sortie grand ouverte. Dans de plus rares cas, vous obtiendrez une réponse positive s’il souhaite vous conserver.

Au lieu de jouer les gros bras, prenez le temps de faire une analyse en profondeur de vos forces, de vos faiblesses, de vos récents accomplissements, mais aussi de vos échecs. Préparez vos arguments et étayez-les avec des faits, pas des opinions. Apprenez à faire ressortir ce qui fait votre valeur ajoutée au sein de l’entreprise et de quelle manière vous comptez continuer à apporter votre pierre à l’édifice.

« Donnez des exemples tangibles de projets accomplis, mais aussi des exemples quantifiables. Idéalement, il faut prouver combien d’argent vous avez fait économiser à l’entreprise, combien d’argent vous avez fait gagner à l’entreprise, ou combien d’heures de travail vous avez économisées », Michelle Joseph, CEO de PeopleFoundry.

Erreur 4 : se comparer aux autres

Là encore, mauvaise idée ! Le sujet de conversation, c’est vous, et pas vos collègues.

Vous voulez être payé autant que votre collègue ou percevoir la même augmentation ? Évitez le jeu des comparaisons, vous n’avez très certainement pas toutes les cartes en main pour évaluer la situation. Mieux vaut rester concentré sur ses réalisations.

Comparer votre salaire à celui de vos collègues est également dangereux, parce que vous vous aventurez sur un terrain inconnu et miné. Êtes-vous certain qu’Antoine a été augmenté de 5 %, même si ce dernier est un collègue en qui vous avez confiance ? Vous pourriez être surpris par la réponse de votre boss à ce sujet ! Et puis, quel est le rapport entre Antoine et vous ? Vous êtes tous les deux chefs de projet, mais il a huit ans d’ancienneté — vous, trois — et il gère sa propre équipe — vous, pas encore…

« Ne faites jamais porter la conversation avec votre patron sur un autre employé, il s’agit de vos performances et de la valeur que vous créez pour l’organisation », Allison Hutton, chief talent officer chezAllavanti Group.

Erreur 5 : présenter son salaire comme un problème

Se morfondre et se plaindre de sa propre situation en face d’un supérieur ne fait pas partie des méthodes les plus efficaces pour obtenir un meilleur salaire. Le registre des émotions n’est certainement pas le meilleur chemin à emprunter.

Communiquer vos revendications de manière posée fera passer votre demande comme le fruit d’une véritable réflexion. Évacuez vos frustrations avant de prendre la parole ; soyez porteur de solutions, pas l’oiseau de mauvais augure à qui l’on n’a pas envie d’accorder un entretien en one to one.

Dans le même registre, n’invoquez pas votre vie personnelle lors d’une négociation de salaire. Si l’une des motivations de votre demande est, par exemple, le fait que vous êtes sur le point d’avoir un enfant, que vous avez besoin d’argent pour vous acheter une maison plus grande ou pour payer vos prochaines vacances, n’en parlez pas. L’idée d’un monde dans lequel nous recevons tous des augmentations en fonction de notre mode de vie ne tient pas la route bien longtemps.

Dernier conseil : quelle que soit votre stratégie, préparez-vous à recevoir une réponse négative avec philosophie. Un « non » aujourd’hui n’est pas définitif. Vous aurez sûrement l’occasion de retenter votre chance plus tard, alors gardez le sourire et analysez les raisons de ce refus plutôt que de vous braquer en déplorant l’injustice qui vous est faite !